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Connaissances

Mettre fin à la défécation à l'air libre au Sahel : bilan positif d'un projet pilote conjuguant les approches ATPC et SABC

Mettre fin à la défécation à l'air libre au Sahel : bilan positif d'un projet pilote conjuguant les approches ATPC et SABC

En dépit du climat d’insécurité qui règne dans la région nord du Burkina Faso, l’objectif fixé par le projet Eau et croissance économique durable au Sahel (ECED-Sahel) pour l’abandon de la défécation à l’air libre a été dépassé. Ainsi, à la fin de la mise en œuvre du projet en 2019, 76 % des 2093 ménages sondés utilisaient des latrines, contre 1 % en début de projet (1). Ce succès impressionnant est le résultat de la combinaison de deux approches complémentaires qui ont permis d’accompagner les populations dans un processus de changement de comportement : l’approche d’Assainissement total piloté par la communauté (ATPC) et l’approche Art social pour le changement de comportementMC (Social Art for Behaviour Change – SABC) de One Drop.

La défécation à l’air libre est une menace pour la santé et la sécurité publiques, surtout celles des femmes et des filles, et un obstacle au bien-être social et économique. Au début de la mise en œuvre du projet ECED-Sahel en 2016, cette pratique était courante dans les communes rurales de Gorom-Gorom et de Falagountou au Burkina Faso. Mis en œuvre par CowaterSogema International et cofinancé par Affaires mondiales Canada, la société minière IAMGOLD et la Fondation One Drop, le projet ECED‐Sahel avait pour objectifs d’appuyer la croissance économique durable dans ces deux communes sahéliennes grâce à l’eau, l’assainissement et l’hygiène comme leviers de développement, de soutenir les activités génératrices de revenus, de stimuler un changement de comportement, de promouvoir l’égalité entre les sexes et de renforcer la gouvernance locale.

L'APPROCHE D'ASSAINISSEMENT TOTAL PILOTÉ PAR LA COMMUNAUTÉ : DE QUOI S'AGIT-IL?
L’ATPC est une démarche participative employée pour confronter les populations à leur pratique de la défécation à l’air libre. Elle suscite un sentiment de dégoût et de honte au fil de diverses activités‐chocs qui, dans un premier temps, déclenchent une prise de conscience et un engagement collectif à mettre fin à la défécation à l’air libre (2). Par la suite, la communauté décide de se construire des latrines avec les moyens qui lui sont accessibles. Le premier contact avec les deux communautés a été établi par les autorités communales à travers une campagne de communication qui a mobilisé les autorités coutumières et religieuses de chaque village ainsi que les membres de la communauté pour les amener à s’impliquer dans des activités d’ATPC à venir. Cette campagne a catalysé l’abandon de la défécation à l’air libre et l’adhésion de la population à la construction d’ouvrages d’assainissement par ménage qui, à la fin du projet, couvraient les besoins de 21 500 personnes, soit plus de 41 % de la population des communes de Gorom-Gorom et Falagountou (1).

Après 18 mois de mise en œuvre de l’ATPC, la construction de latrines allait bon train. Cependant, 36 % des latrines construites n’étaient pas convenablement entretenues et le lavage de mains avec du savon aux moments critiques n’était pas pratiqué (1). Interrogés par les intervenants du projet, les nouveaux propriétaires des latrines ont fait état de certaines barrières à l’abandon de la défécation à l’air libre, à l’entretien adéquat des latrines et au lavage des mains, notamment, les mauvaises odeurs émanant de latrines mal entretenues, la mauvaise compréhension des voies de contamination, la non-perception des risques liés au non-lavage des mains après l’utilisation des latrines ou avant de manger. Pour faire face à ces obstacles, le projet ECED-Sahel a introduit l’approche SABC dans une logique de synergie, afin de compléter l’approche ATPC. Si l’approche ATPC amène les membres de la communauté à abandonner un comportement – dans ce cas la défécation à l’air libre – et à construire des toilettes, les interventions SABC encouragent l’adoption de comportements liés à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène tels que l’utilisation systématique des toilettes, leur entretien régulier et le lavage des mains avec de l’eau et du savon.

L' ART SOCIAL POUR LE CHANGEMENT DE COMPORTEMENT : DE QUOI S'AGIT-IL?
L’approche SABC est un processus participatif de création artistique qui puise dans les richesses artistiques et culturelles locales où le message lié au changement de comportement et les interventions (théâtre‐débat, murales, contes, chansons, danse, etc.) se construisent « avec » les participants, qui deviennent ainsi les protagonistes de leur propre changement de comportement1 grâce à une participation accrue aux processus créatifs dont ils sont les principaux acteurs. Les activités sont conçues et mises en œuvre par, avec et pour les participants. Dans le cadre de ce projet, l’approche SABC a été intégrée au processus ATPC, en amplifiant et en diffusant des messages complémentaires : tandis que l’ATPC favorise l’abandon de la défécation à l’air libre, l’approche SABC favorise l’adoption durable d’un éventail de comportements liés à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène.

APPRENTISSAGES
À la clôture du projet, c’est-à-dire après 30 mois de mise en œuvre de ces deux approches synergiques, 98 % des latrines construites étaient convenablement utilisées et entretenues et plus de 16 000 personnes avaient adopté le lavage de mains avec du savon aux moments critiques alors que la cible était de 12 000 personnes (1). Par-delà cette efficiente symbiose séquentielle des approches (l’approche ATPC a été la première à être mise en œuvre et, avant de mettre fin à ses interventions, l’approche SABC a été présentée à la communauté suivant une séquence qui a permis une fusion plus naturelle des deux approches), plusieurs facteurs ont contribué au succès du projet. Les leaders communautaires ont été impliqués dès la conception des interventions. Les conseils villageois de développement se sont mis à la disposition des communautés et ont assuré l’organisation pratique et la communication autour des interventions. Quant aux leaders religieux, ils ont puisé dans leurs valeurs et croyances pour appuyer les messages d’hygiène du corps et des habitations. Des agents et leaders locaux de changement (artistes, facilitateurs de débat, hygiénistes, animateurs ou enseignants) ont influencé le groupe de priorité auquel ils appartiennent eux-mêmes, en agissant comme modèles à suivre.2 En plus de permettre aux communautés de jouer un rôle prépondérant dans leur propre processus de changement comportemental, l’ATPC et le SABC s’accordent sur une valeur fondamentale et un facteur de succès : l’ancrage émotionnel comme déclencheur d’engagement. Ainsi, alors que l’intervention « choc » de l’ATPC suscitait le dégout pour provoquer une rupture avec les habitudes de la défécation à l’air libre, les processus participatifs et créatifs de l’approche SABC, tels que les peintures murales, la musique3, les contes, le théâtre, la danse, les pièces de théâtre radiodiffusées, suscitent la joie et la fierté et favorisent l’adoption des comportements désirés.

FACTEURS DE SUCCÈS
Le dernier facteur de succès consistait à valoriser l’intelligence collective comme catalyseur d’actions durables grâce à un espace de débat constructif permettant de faire valoir des points de vue différents, de mettre à nu les tabous liés à la défécation à l’air libre et à l’utilisation et l’entretien des latrines, ainsi que d’enrichir la réflexion collective pour définir ensemble les solutions à mettre en place. Les populations de Falagountou et de Gorom-Gorom ont pris conscience de l’urgente nécessité d’abandonner la pratique de la défécation à l’air libre, se sont dotées de latrines et se sont mises à les utiliser et à les entretenir, et ont adopté le lavage des mains avec de l’eau et du savon aux moments critiques – grâce à la répétition et à la cohérence des messages véhiculés par les leaders locaux et par l’utilisation complémentaire des approches ATPC et SABC. Les résultats positifs de ce projet pilote paraissent encourageants dans la perspective d’une réitération de l’expérience, et ouvrent la porte à relever de nouveaux défis liés à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène (EAH).

Lire l'étude de cas complète

REFERENCES
1. Cowater Sogema. Rapport de fin de projet. 2020.
2. Kamal Kar, Robert Chambers. Manuel de l'ATPC. 2008.
1 L’approche SABC a été mise en œuvre au sein de ECED‐Sahel avec l’appui technique de l’Espace Culturel Gambidi.
2Le groupe de priorité était constitué des populations des deux communes et principalement des bénéficiaires des ouvrages.
3Par exemple, l’utilisation du goumbé et de la guitare traditionnelle fabriquée localement.

Crédit photo : Jade Productions

En apprendre davantage sur ce projet
Le projet ECED-Sahel : Eau et croissance économique durable dans la région du Sahel
104 000
Population cible
4 ans
2016 à 2020
Région du Sahel Burkina Faso
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